Rendez-vous en steppes mongoles
- Ronan
- 8 juil. 2017
- 8 min de lecture

Ce matin, nous partons à la rencontre de notre famille, près de Lun, chez qui nous allons rester trois jours. Dans la voiture qui nous emmène, le chauffeur nous apprend quelques mots en mongol ainsi que les prénoms de la famille que nous avons bien du mal à retenir. Les accents et la prononciation ne sont pas aussi dur qu'en Chine, non en fait, on a l'impression que c'est encore pire ! Nous retiendrons tout de même très bien "Jartè" à prononcer "rrrralté" qui signifie "je t'aime" et sera, selon notre chauffeur, le mot à connaître. Il est d'ailleurs plus qu'heureux de pouvoir le dire en Français, mot d'amour qu'il nous dira à plusieurs reprises lors de nos différentes rencontres ! Un sacré personnage celui-là !
Une bonne heure et demie de route bitumée (mais trouée sinon ce serait trop simple), une halte au bord de la rivière mais du mauvais côté de la rivière, et un peu (beaucoup) de sable dégusté contre notre gré, quelques yourtes installées au beau milieu de nulle part dépassées et nous arrivons encore plus au milieu de nulle part. Deux yourtes sont montées. L'une sera notre maison, l'autre celle de la famille dont la décoration nous laisse rêveurs ! Imaginez un peu trois petites têtes brunes sortant d'une yourte, celle-là même dont vous avez rêvé toute votre enfance parce que, oui, une nuit dans une yourte, ça nous fait tous rêver un peu ! Ces trois petites têtes brunes, ce sont Tchinzerouk, Itchkaa et Nomkaa, les enfants de Ounrro (la maman) et Durré (le papa).
Ils nous accueillent timidement mais avec un sourire jusqu'aux oreilles, nous invitant gentiment à entrer dans leur yourte. L'intérieur est sommaire mais rien ne manque : sur la gauche un petit évier (sans eau), puis deux lits simples longent la paroi. Sur la droite, une brebis (enfin ce qu'il en reste) découpée en morceau et toute sèche. Bah oui, il n'y a pas de frigo ici alors la viande sèche à l'air libre ! Pour bien tenir, les morceaux de viande sont coincés entre les arceaux de la yourte. Juste à côté, la tête de la brebis attend son heure.
Ounrro s'en occupera deux jours plus tard, à l'aide d'un chalumeau.



La cuisine se fait à l'extérieur de la yourte car les journées sont très chaudes ici, il s'agirait de ne pas trop chauffer l'habitat s'ils veulent avoir une chance de pouvoir dormir...
Du coup, ils ont installés une petite cabane à l'extérieur avec un foyer, quelques ustensiles de cuisine et deux énormes barils d'eau puisée dans la rivière en contrebas.


Un peu plus loin, on aperçoit une toute petite cabane - comprendre trois bouts de taule plantés dans le sol - qui entoure un joli trou. Ce sont les toilettes avec, s'il vous plaît, une vue de choix sur la vallée. Bah non, il n'y a pas de porte, à quoi cela servirait-il ?! Et puis, entre nous, ça aurait vraiment été dommage de cacher une telle vue derrière une porte. Bref. La visite de notre nouveau chez nous s'achève là.


Après nous avoir proposé une tasse de thé, nous mangeons notre repas tous les six au doux son des fourchettes dans les assiettes car nos petits hôtes ne parlent malheureusement pas anglais. Mais qu'importe, les sourires sont là ! Notre premier repas est, bien entendu, composé de mouton. Comme tous les repas qui suivront d'ailleurs. On se dit qu'on aurait peut-être dû amener plus de légumes car ils en manquent cruellement dans les environs.

Et que ferons-nous pendant ces quelques jours passés avec notre famille ?!
Nous flânerons beaucoup. La chaleur est écrasante et le soleil sera plus que généreux concernant la distribution de Vitamine D !
Contre toute attente, nous ne galoperons pas aux côtés du troupeau de brebis et de chèvres pendant notre homestay.
Le millier (oui, oui vous avez bien lu) de bêtes que possède la famille se gère tout seul. Nous n'en croyons d'ailleurs pas nos yeux lorsque, alors même que nous admirons un coucher de soleil incroyable aux couleurs pastel mêlant mauve, violet et bleu, accueillant à la fête des nuages qui ont l'air comme peints, posés sur les montagnes qui nous entourent.
Tableau magique auquel s'ajoute une lune pleine immense qui illumine le ciel étoilé. Spectacle parfait, vous en conviendrez. Mais reprenons ! Nous n'en croyons pas nos yeux lorsque des centaines et des centaines de bêtes s'approchent de nous, pas à pas avec des bruits plus que sus(pe)c(ts) ! Un moment convivial qui nous amusera pas mal lors de nos parties de cartes nocturnes. Bah oui, il faut bien s'occuper et Julien avait un super jeu à nous apprendre, ce qui tombait plutôt bien !


Le troupeau restera chaque nuit autour des yourtes. Les chiens montent la garde. Eux aussi chaque nuit. Punaise on ne les entend pas pendant la journée, on comprend pourquoi : ils vivent la nuit... Pas de bol !
À chaque journée une mission. Il ne faut pas qu'on force trop quand même ! Tantôt mission "allons chercher de l'eau à la rivière", tantôt mission "montage de yourte", tantôt mission "trouver une solution pour avoir de l'air sous la yourte parce qu'on étouffe", tantôt mission "découverte des alentours", mission "baignade avec les crottins flottants" ou encore mission "toi aussi avale du mouton à tous les repas de la journée". Il faut l'admettre, le mouton, on commence déjà à en avoir assez, même au bout de deux jours.
Il faut dire que celui-ci est particulièrement fort et ne passe d'ailleurs plus dans mon gosier pour ma part. À la vue d'un immense thermos, nous pensons tous pouvoir faire une pause mouton. C'était sans compter sur notre généreuse famille qui a a glissé un bouillon de mouton... On trouvait l'eau un peu jaunâtre, on comprend mieux pourquoi. On tentera tout de même un mélange avec du thé. Mais rien de glorieux ce sera encore moins buvable à 9h du matin. Qu'importe, on mangera des légumes une autre fois !
Mais pour l'heure, nous devons nous rendre à la rivière car il fait plutôt chaud et nous n'avons plus d'eau. C'est parti pour une vingtaine de minutes en direction de la seule source d'eau de la région visiblement. En chemin, nous croisons un jeune mongole qui entraine son cheval pour le "Naadam". Signifiant "jeu" en mongol, le Naadam est le plus grand évènement traditionnel de Mongolie - et aussi le plus renommée - au cours duquel ont lieu trois compétitions majeures qui restent très ancrées dans la culture Mongole : la lutte, le tir à l'arc et les courses de chevaux (courses qu'effectuent les jeunes enfants et pour cause : il faut être léger pour aller plus vite !). Le jeune cavalier nous demande d'ailleurs si nous souhaitons monter à cheval sur son poulain qui a l'air un peu énervé. Pas téméraires sur ce coup-là, on refuse poliment en bottant en touche ! Nous le regardons s'éloigner avec ses deux chevaux, il est beau dans son habit traditionnel mongol. Sorte de tunique longue, aux manches longues, un rabat large qui se plie sur la poitrine avec des boutons sur la droite, un col haut et une bande de tissu attachée autour de la taille en guise de ceinture. Cet habit, ils sont nombreux à le porter, surtout dans le centre du pays où nous nous rendrons plus tard.

Mais pour l'heure, c'est toujours mission eau ! Lorsque nous arrivons devant le cours d'eau, elle est plus que stagnante et ne nous fait pas vraiment rêver. Le temps de trouver un endroit où l'eau est un peu plus claire et Julien est déjà parti dans l'eau pour remplir les bouteilles et faire la vaisselle, évitant les quelques crottins de cheval qui flottent de-ci, de-là. Nous restons trois bonnes heures près de la rivière, loin de tout et de tous, à refaire le monde. On est bien ! Puis, on repart en direction de notre campement car nous avons une yourte à monter ! Mais d'abord, c'est déjeuner avec des morceaux de moutons à peine cuits dans une bassine en plastique d'un côté et des "morceaux de pâtes cuites" dans le jus de viande (de mouton of course) d'un autre côté. Bon, allez, au moins on est sauvés, il y a de l'eau chaude pour nous faire un petit thé. Ah bah non, c'est encore un bouillon d'huile et de jus de viande. Pas grave, il y a un bon lait de brebis qui nous attend. Aciiiiide ce lait ! Punaise, on ne s'y attendait pas à celui-ci ! Nous sommes quelque peu surpris par le goût de ce lait qui est en passe de tourner au yaourt si ce n'est déjà fait depuis quelques mois... En fait, on ne sait pas trop mais le goût est ma foi très prononcé !
Le lendemain, nous aurons un bouillon de mouton avec quelques morceaux de pommes de terre, le surlendemain, quelques vers s'inviteront également dans nos assiettes que Roro aura vu après coup... Ils sont plein de surprises ici décidément !!! Après une petite sieste - eh oui, on se met au rythme des locaux - nous nous joignons à notre famille qui a déjà commencé à monter la yourte.



Trop heureux de nous joindre à la fête ! Bah oui, on a pas l'occasion de monter une yourte tous les dimanches ! Et c'est ma foi, plutôt simple à monter. Nous sommes dix en même temps, à deux, ce serait mission impossible. Pendant que nous sommes cinq ou six à tenir la structure en bois (treillis bois mais très souple) qui sert de mur à la yourte - elle-même attachée à la porte en bois -, le chef de famille fait passer deux étages de cordes dans les arceaux afin de mieux maintenir l'ensemble.
Ensuite, c'est le moment de monter ce qui sert de toit. L'armature principale : une couronne centrale et deux poteaux en bois. De nombreuses entailles sont faites dans la couronne afin de pouvoir y insérer les "chevrons" (en bois eux aussi) qui reposent ensuite sur le mur-treillis.

On les attache au mur-treillis en simultané, d'où la nécessité d'être plusieurs et plutôt bien répartis autour de la structure ! Autrement, la structure tomberait très rapidement par terre ! Une fois tous les arceaux mis, on entoure les murs d'immenses tapis de peaux de moutons que l'on encorde ensuite très solidement sur deux endroits différents.

Ensuite, un drap est posé sur la toiture, puis deux couches de tapis en peaux de mouton toujours. La tâche n'est pas simple, d'autant que le vent commence à se lever ! Mais on réussit tout de même à maintenir le tout en enfilant un drap fait sur mesure autour de la yourte avec pour seul trou celui situé sur le toit, au niveau de la couronne afin de laisser passer de l'air, de la lumière et parfois même, des oiseaux (ça c'est pas vraiment volontaire mais cela nous arrivera !). Mission accomplie ! Nous avons construit pour la première fois de notre vie, une yourte, dans les steppes mongoles, avec des Mongols !



Pour fêter cela, un jeu de carte s'impose. Entouré, comme toujours, du troupeau qui se rapproche, doucement...
Le lendemain, il est déjà temps de repartir à Oulan-Bator. Mais avant, nous décidons d'aller grimper la colline située derrière la yourte d'où nous aurons un superbe panorama sur la vallée !



Après cela, nous partons en direction du fleuve où les garçons décident de faire tomber le slip pour s'octroyer une petite baignade. Fraîche mais vivifiante ! Enfin, ça a l'air ! Puis, il est déjà temps de repartir en direction de la yourte où notre repas nous attend déjà. Cette fois-ci, même mon ptit cul ne pourra pas manger son plat : au programme, viscères de brebis mélangées au riz, carottes et pommes de terre. Dommage, tout ce frichti avait l'air bon de loin... mais l'odeur est à l'image du goût ! On se venge sur l'eau chaude tant pis pour nous...
Le temps des "au revoir" sonne déjà. Nous regrettons de ne pas avoir eu de guide avec nous pour pouvoir traduire tout ce que nous aurions aimé partagé avec cette famille qui nous a gentiment ouvert les bras.
Une prochaine fois peut-être ! En attendant, nous rentrons, croisons le cortège du nouveau président qui faisait sans doute un discours lors de l'inauguration du Naadam et nous préparons pour le grand départ. Demain, c'est parti pour 18 jours d'immersion en Mongolie !


PRATIQUE
Côté pratique
Pour aller rendre visite à Ounrro et sa famille, demandez directement à Khongor guesthouse, ils feront le relais par téléphone.
Tarif homestay : 5 dollars par jour et par personne (repas + couchage). A payer directement auprès de la famille
Tarif voiture : 90 dollars aller-retour (restez donc quelques jours chez Ounrro sinon ça ne vaut pas le coup !)
Bon à savoir : si vous ne supportez pas la chaleur et le fait de ne pas avoir de douche, passez votre chemin !
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