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  • Ronan

De Huaraz à Willkahuain : immersion dans notre famille péruvienne



Une fois n'est pas coutume, nous arrivons tôt, un peu trop tôt, à Huaraz. 5h du matin à 3000m d'altitude ça pique un peu. Alors on va rester attendre que le soleil fasse son apparition et que le premier café possédant un wifi ouvre ses portes. On en a besoin pour trouver l'agence "Alternative Peru" et son guide Cristian, contact trouvé par mon p'tit cul la veille sur un blog de voyage. Ça avait l'air tellement bien qu'on a changé nos plans ! On va faire un peu de volontariat. Bon par contre, on a beau chercher sur internet, on ne trouve pas d'adresse. Dans le doute, on demande à la police touristique sait-on jamais !? "Alternative Peru? Non. Cristian le guide ? Bien sûr qu'on le connaît, on l'appelle pour vous si vous voulez!". Ni une ni deux, nous voilà partis en direction du petit village de Willkahuain en compagnie de deux personnes de la police touristique très sympathiques. On s'éloigne de la ville - alors en pleine effervescence - pour un décor bien plus rural et plus paisible.



En arrivant à Willkahuain, c'est Nelson le frère de Cristian qui nous accueille et nous accompagne directement à la maison où nous logerons pendant une semaine. Aurélia alias "Mamita" (leur maman) est aux fourneaux et nous accueille avec un grand sourire. On va être bien ici, on le sent. On nous montre notre grande chambre que nous partagerons avec une autre volontaire, Marlin, puis nous avons quartier libre car il est trop tard pour commencer à travailler aujourd'hui. On en profite donc pour faire notre petite lessive dans la rivière au savon de Marseille (merci mamie Françoise), à l'ancienne.


Un déjeuner plus tard, soupe de pommes de terre au menu, on décide d'aller faire une petite promenade. Après tout, nous sommes ici en plein cœur du Parc national Huascaran - traversé à la fois par la Cordillère blanche et la Cordillère noire (rien que ça) - qui compte plus de 650 glaciers, 400 lacs et une quarantaine de rivières ! Une bagatelle en somme... Bref nous disions petite promenade donc qui se transformera en bonne randonnée pas du tout prévue avec un bon 1200m de dénivelés quand même. On ne l'avait pas vue venir celle-là ! La marche sera rapide car l'heure tourne, mais ça valait la peine de grimper jusqu'ici. La laguna Ahuac est entourée de pics, dont un enneigé en fond de toile, c'est magnifique.


Une quinte de toux (qui n'aura pas raison de moi, mais c'était moins une) nous fera redescendre en quatrième vitesse. À 4550m d'altitude, le souffle est court... On assiste au coucher de soleil sur les monts enneigés, un moment magique !

De retour à 3300m, une douche gelée et un repas plus tard, on discute longuement au coin du feu avec notre hôte et Marlin. Il est question de cérémonie, de Wachuma et de Yachak... Bon on ne connaissait pas ce genre de rituel mais on verra si on se laisse tenter. Pour l'heure, on file rêver de grands espaces.


A Willkaain, les jours s'enchaînent mais ne se ressemblent pas. On bosse dur avec des tâches homme/femme bien différentes : avec Marlin et Mamita, on est préposées "ménage". Entendre par ménage le déblayage d'un bâtiment avec en guise d'outils une balayette format "bouquet" de paille et une truelle pour décoller les tas de terre ou ramasser les cailloux, le tout bien entendu dans un nuage de poussière, sinon c'est pas drôle.








Pour Roro et le patriarche (compliqué pour Roro, bien que très gentil, il parle un peu dans sa moustache en utilisant un vocabulaire qu'on ne maîtrise pas du tout à savoir pelle, truelle, brouette, ciment... La base quoi !), ce sera transport de seaux de cailloux (que nous, les filles, aurons remplis avec amour), fabrication d'une chape de béton et mise à niveau du sol avec... une ficelle et une poutre en bois.


Autre activité féminine : le jardinage. Mais ici, il y aura un piège : le lama à ne surtout pas approcher, il est très généreux quand il s'agit de partager sa salive...


De retour à la maison après une journée de dure labeur, on se décide : on va la faire cette cérémonie avec Cristian. Parce qu'on ne vous a pas dit, mais il est réputé pour être un très bon Yachak (autre nom que l'on pourrait traduire comme Chaman). Du coup, notre programme de demain est tout trouvé : on va aller cueillir le cactus, l'éplucher et préparer la potion.


Que dire sur cette cérémonie ? Il faut le vivre pour mieux la comprendre. Après avoir discuté avec ses ancêtres, Cristian nous invite à méditer et à demander ce que nous souhaiterions

voir/découvrir à travers cette cérémonie. Ensuite, nous partons à la cueillette du cactus San Pedro, appelé le Wachuma en Quechua, sur les terres de Cristian. Et là vous vous dites : "Il a quoi de spécial ce cactus?". Wachuma est une plante sacrée dont le nom commun est le San Pedro... Pourquoi ce nom ? Car cela t'ouvre l'esprit, donc cela t'ouvre à Saint Pierre. On aura pas plus d'explication.

Roro et moi serons chargés d'enlever les épines et la peau des nombreux morceaux de cactus que l'on vient de récolter... Bah on en a pour quelques heures ! Pendant ce temps-là, Marlin et Cristian disparaissent pour aller nous acheter des vivres pour demain matin. Oui parce que pour que la potion fonctionne encore mieux, il faut être à jeun. Autant vous dire que demain matin,on risque d'avoir super faim ! Pendant notre découpe, la doyenne du village débarque et nous insulte en Quechua en brandissant sa machete. Non pas qu'elle nous fasse peur m'enfin quand même un petit peu. On aura beau lui dire "Amapourice" qui signifie "bonjour" en Quechua, rien n'y fera, on arrivera pas à l'attendrir. Elle continuera de baragouiner quelques mots en espagnol, le reste dans sa langue natale, des insultes sans doute. Les chiens de Cristian qui sont restés avec nous ne l'apprécient pas non plus, ils sont à deux doigts d'attaquer. Il faut dire qu'elle crie comme un putois, elle essaye sans doute d'appeler des gens à l'aide, pour qui, pour quoi ?!... Après réflexion, son pétage de plomb devait sûrement être lié au fait que le cactus est une plante sacrée, même si notre Yachak alias Cristian nous assurera que les 3/4 des gens ici ne savent pas ce qu'est le San Pedro...Bon, elle est bien mignonne la mamie, mais elle nous ralentit dans notre travail. Résultat : bah on est un peu plus lent que prévu. Elle finira par partir en nous insultant de voleurs, toujours agréable. On l'a un peu "amer" avec Roro parce que Cristian ne nous avait pas dit qu'on risquait de se faire alpaguer violemment et par une quasi centenaire en plus ! Bref, à cause de la "vieille à la machete" (ça pourrait faire un super nom de film ça !!), on finira le travail à la maison où d'autres tâches nous attendent : la découpe, le broyage, la cuisson et l'essorage (oui oui). ​​












Mais avant cela, pause syndicale : une jeune femme du parc est venue sensibiliser les enfants (et nous) au développement durable et à l'importance de la préservation de l'environnement. Grosse partie sur les déchets laissés par les touristes d'ailleurs (non, ils ne sont pas les seuls responsables, mais c'est vrai qu'on a croisé pas mal de gens peu scrupuleux, notamment quand il s'agit de se débarrasser de sa poubelle au pied d'un glacier, bah oui c'est lourd hein ! Quand on est con...). C'est déjà fini la pause ? Il faut se remettre à l'épluchage du cactus ? Non pas qu'on ne veuille pas, mais on ne peut physiquement pas. Essayez donc d'éplucher de la peau de cactus pendant 6 heures, on en reparle après ! Du coup, chacun se met à un poste différent : découpe des longs morceaux de cactus, broyage des morceaux

jusqu'à obtenir une matière visqueuse fort ragoûtante, un ptit tour dans la marmite (attention Roro, faut bien remuer toutes les 5 minutes sinon ça ne va pas fonctionner...), avant de passer à l'étape finale : on filtre et on essore grâce à un tee-shirt et beaucoup de poigne. Il est déjà 23h quand nous nous installons au coin du feu, ponchos sur le dos et tapis de sol en peau de mouton. Quelques incantations, bâtons de Palo Santo brûlés (bois sacré) et huile de fleur à la rose étalée sur notre visage plus tard, nous buvons le breuvage que nous avons mis tant de temps à préparer.

On a beau y avoir mis du cœur, c'est infâme. Tant au niveau du goût que de la texture. Un mélange de brûlé et de vomi, le tout avec la texture de fruit de la passion... On vous laisse un peu imaginer : un peu gluant et pas appétissant ! On avale tous notre tasse difficilement. Et maintenant on attend que cela fasse effet, les yeux rivés sur le feu. Roro est sceptique, lui qui est plutôt terre à terre... Au bout du compte, la potion fera bien plus effet sur lui que sur moi. Et là vous vous demandez "qu'ont-ils fait, qu'ont-ils vu ?? Est-ce réel ? Ils ont pris des champignons c'est pas possible !!" Qu'a-t-on fait pendant des heures ? Rien. Notre corps est resté là, près du feu, pendant que notre esprit, lui, a erré où bon lui semblait : dans les étoiles, dans l'univers, dans le passé, dans le futur et ce pendant quelques heures. Wachuma nous fera prendre conscience que tout ce qui nous entoure est vivant. Je sais, ça sonne un peu comme dans le dessin animé Pocahontas. Mais si, souvenez-vous de ses paroles : "Tu crois que la terre t'appartient toute entière, pour toi ce n'est qu'un tapis de poussière. Moi je sais que la pierre, l'oiseau et les fleurs, ont une vie, ont un esprit et un cœur...". Mais en vrai, elle a raison Pocahontas ! Tout respire la vie autour de nous et cette expérience ne fera que décupler notre admiration pour ce qui nous entoure.

Le petit matin pointe le bout de son nez, la faim nous tenaille il est temps de manger quelque chose. Nous reprendrons doucement nos esprits, nous souvenant de tout car étant restés conscients toute la nuit. Nous partagerons notre expérience avec Cristian et lui demanderons la signification de ce que nous avons vécu. Condors, félins, araignées, pluies d'étoiles, personnes de notre entourage... On en dira pas plus vous risqueriez de ne pas nous croire. Le soleil est désormais haut dans le ciel, nous décidons d'aller faire une razzia au marché de Huaraz histoire de se remplir l'estomac comme il se doit ! Puis, nous nous coucherons tôt car demain, une longue randonnée nous attend du côté de la Laguna 69 avec un réveil à 5h40. Ça pique ! Mais quelle journée !

Accompagnés de Cristian, nous passerons hors des sentiers battus pour nous rendre à cette superbe lagune. En route, nous passons à côté de la lagune Chinancocha (lagune de la femme), puis de la lagune Orcuncocha et enfin de la montagne la plus haute du pays : Huascaran (pas loin de 7000m quand même). On en prend plein les mirettes tellement cet endroit est remplit de magie : glaciers, lagunes, yanapakcha (cascade), pics enneigés. Roro ne sait plus où donner de la tête avec son appareil photo, passant d'un côté à l'autre de la voiture lors de la montée, oubliant presque que je suis assise à côté de lui. Je sais que mes genoux sont confortables, mais tout de même ! Je lui pardonne, les photos sont plutôt pas mal...




Nous laisserons la voiture puis, après avoir descendu une montagne abrupte, traversé une longue plaine, monté une côte relativement sympa (:)), nous arrivons à la laguna 69. Que dire ? Le point de vue pour un pique-nique à 4700m d'altitude est très agréable : une eau d'un bleu turquoise intense, une montagne et un glacier qui imposent une bouche ouverte de béatitude. Que demander de plus ? Rien.


Nous resterons là à contempler ce magnifique spectacle en nous disant qu'on a de la chance d'être ici.


Le lendemain, une autre escapade nature nous attend : glacier Pastoruri, nous voilà ! 3 heures de bus pour s'y rendre, quand même, mais ça vaut le détour. Nous sommes à la fois heureux et désolés devant ce spectacle. Le réchauffement climatique aura raison de cette merveille d'ici peu et le travail a déjà bien commencé à en croire les photos datant de seulement 5 ans. Nous sommes ici à 5200m d'altitude et la glace perd de plus en plus de terrain, c'est désolant.






Les 45% de glacier qu'il reste comparé à quelques années en arrière sont malgré superbe. Il y a un nombre de bleus incalculable, des crevasses et des stalactites se forment un peu partout rendant le cœur de ce chef d'œuvre impraticable.


Personne ne peut plus l'escalader depuis cinq ans de toute façon, c'est interdit et c'est tant mieux. Une mesure qui arrive un peu tard, mais mieux vaut tard que jamais... Une fois de plus donc, Cristian nous accompagnera hors des sentiers battus pour nous faire découvrir le glacier à sa façon. Nous repartirons avec des étoiles plein les yeux tant cet endroit est magique. Sur la route du retour, nous passons au travers de montagnes gigantesques au milieu desquelles trônent deux ou trois maisons et quelques Puya Raimondi, plante alto-andine emblématique du coin pouvant vivre jusqu'à 100 ans et atteindre une quinzaine de mètre de hauteur.








Après cette belle journée, nous rentrerons déguster notre cuy - ou cochon d'Inde - cuisiné par Mamita. Il paraît qu'elle fait le meilleur de la région. Mais au fait, on ne vous a pas décrit la maison ?! Aaaaaah la maison familiale, c'est toute une aventure. Ici cohabitent sous le même toit cuyes, chats, chiens, poules et humains. Mais les plus nombreux, ce sont les cuyes que Mamita nourrit soigneusement tous les jours. Ils sont une bonne centaine à émettre leur cri si reconnaissable : ils font cuicui, c'est certainement de là que leur vient ce nom d'ailleurs ! Enfin, toujours est-il que Mamita nous fera déguster un cuy. Résultat : c'est un mélange entre du lapin et du poulet, très bon !


Après cet excellent repas, on reste à discuter avec Mamita et Cristian au coin du feu. Il faut dire que c'est notre dernière soirée, nous sommes un peu nostalgiques de quitter cet endroit si paisible. Et ce ciel, regardez moi toutes ces étoiles, vous les voyez ?! Allez, trêve de rêverie et au dodo les jeunes, demain, ça a beau être notre dernier jour, on ne va pas chômer ! Après un petit-déjeuner costaud (ici c'est soupe de pomme de terre matin, midi et soir), on se rend sur le terrain de Cristian un peu plus haut et on commence la répartition du travail : Roro bossera avec le patriarche, encore, et moi je bosse avec Cristian. Nos missions : construire des briques en adobe pour Roro. Mais avant de faire les briques, il faut fabriquer l'adobe pardi avec de la terre, beaucoup d'eau et de la paille, le tout en mélangeant avec les pieds! De mon côté, je fabrique la terre qui servira de liant entre les différentes briques d'adobe déjà prêtes et construis le mur de la future maison de Cristian. A chaque brique posée, on vérifie avec un niveau que tout est bien droit, bref on s'est improvisé maçon ce jour-là et c'était bien sympa !






Une bonne douche s'impose... La dernière de toutes les douches gelées avant longtemps, on l'espère. Parce qu'une eau à à peine 10 degrés, ça pique en vrai. Le temps des au-revoir sonne. On reviendra, on en est persuadé ! Il y a beaucoup de choses à faire et à partager encore... À bientôt Mamita, Nelson, Cristian et toute la famille, vous allez nous manquer ! Les ennuis pour moi commenceront ici : j'ai sans doute bu quelque chose qu'il ne fallait pas, on vous laisse imaginer la suite. Cela durera une semaine. Joie et bonheur !! Enfin, on ne se laisse pas abattre, on a un bus de nuit qui nous attend en direction de Ica et de l'oasis de Huacachina.
























Côté transport Pour aller à Huaraz depuis Chachapoyas, vous devez faire escale. Nous avons fait le choix de Trujillo. Chachapoyas - Trujillo : départ à 19h30, halte à Pedro Ruiz avec un changement de bus (1h/1h30 après le départ). Tarif : 60 soles par personne. Compagnie : GH Bus (pas celle du centre ville mais celle en contrebas, demandez votre chemin). Trujillo - Huaraz : temps de trajet : 7h. Compagnie : Linea. Tarif : 55 soles par personne. De Huaraz à Willkawain : prendre un colectivo. Tarif : 1300 pesos par personne. Temps de trajet : 20 minutes.


Côté pratique

Si vous souhaitez faire du volontariat, vous avez sonné à la bonne porte. Vous avez la possibilité de passer par une plateforme telle que Help Exchange ou de contacter directement Cristian au 951590478 ou Nelson au 947450411. L'adresse email : willka83@hotmail.com.


Côté hébergement

Chez Cristian et sa famille dans le village de Willkahuain (demander au monument archéologique du village, Nelson y travaille)

Si vous faites du volontariat : 10 soles par personne, par jour logement et repas compris

Si vous ne faites pas de volontariat : 25 soles par personne, par jour logement et repas compris


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